A la fin de l’année 2023, notre pays comptait près de 1,33 million de PME actives, soit 27.233 PME de plus qu’en 2022, ce qui représente une augmentation de 2.1% sur un an.
Lus sans analyse, ces chiffres pourraient donner l’illusion d’une santé entrepreneuriale saine mais lorsqu’ils sont décryptés, notamment par le service d’études UCM, on constate un ralentissement dans la croissance du nombre de PME, et on enregistre même le taux de croissance annuel le plus bas depuis 2015.
Ce sont les premiers chiffres du « Rapport PME 2024 », mené en étroite collaboration entre UNIZO, Graydoncreditsafe et UCM.
Etat des lieux en quelques chiffres
Fin 2023, la Wallonie comptait 326.908 PME, soit 24,5% de l’ensemble des PME du pays ou une PME belge sur quatre. C’est une augmentation de 1.3 % par rapport à l’année 2022, soit 4064 PME de plus.
A Bruxelles, 136.604 PME ont été dénombrées en 2023, ce qui représentait 10,2% du total des PME belges avec une progression de 777 PME en comparaison avec l’année 2022 (+0,6%).
La Flandre se porte mieux. A elle seule, elle enregistre 54.4 % du total des PME belges et progresse de quelque 2.1 % par rapport à 2022.
Nous pouvons aussi noter qu’au cours de la décennie, le nombre de PME dont les informations sont inconnues/incomplètes (notamment la localisation) a explosé et représente pratiquement 11% du total des PME belges. Cela pose un réel problème pour la mise en place de politiques entrepreneuriales au niveau du pays, des régions et/ou des territoires ciblés : il y a aujourd’hui plus de PME aux données incomplètes que de PME bruxelloises.
Sur un horizon de 10 ans, entre 2014 et 2023, le nombre de PME actives en Belgique a augmenté de manière significative : +27.3%, soit une augmentation annuelle moyenne de près de 2,7%.
La Wallonie enregistre une augmentation de 12,8% sur cette décennie contre 13,3% pour Bruxelles, et la Flandre affiche quant à elle un taux de croissance du nombre de PME actives sur son territoire de 22,8%. Sur la dernière décennie, la Flandre a donc attiré toujours plus de PME et continuer de creuser l’écart avec les deux autres régions.
La personnalité juridique des PME évolue également
La majorité des indépendants choisissent de travailler sous le statut de personne morale pendant que la forme « personne physique » recule dans toutes les régions du pays.
Dans toutes les régions, le statut de personne morale progresse pour représenter aujourd’hui 55% des PME. Cette structuration en personne physique est nettement moins marquée à Bruxelles (+11.3% à Bruxelles en 10 ans contre 23% en Wallonie et 35% en Flandre).
De jeunes PME en pleine mutation
Dans notre pays, une entreprise sur 3 a moins de 5 ans, raison pour laquelle UCM plaide pour un accompagnement accru pendant les premières années de l’entreprise, là où l’entreprise reste la plus fragile. En effet, 5 ans est habituellement considéré comme l’âge charnière pour la survie d’une entreprise.
Les codes du travail évoluent, puisque le nombre absolu de PME entre 1 et 10 employés diminue et que la formule de la « PME sans employés » explose (90% des nouvelles créations).
De là à dire que les chefs d’entreprise revoient les codes du salariat, il n’y a qu’ un pas qui nous mène vers le modèle du « freelancing », dont on ne peut ignorer ni l’existence ni la progression.
Caroline Cleppert, Secrétaire générale UCM : « Notre pays ne peut se passer de la force et du poids économique que représentent les PME. Cela dit, le paysage évolue, la manière de travailler n’est plus la même d’avant le Covid, notamment. Le freelancing pose la question de la PME sans employé et du statut de l’employeur. UCM a coutume de dire que le chef d’entreprise est celui qui a créé son travail, mais aussi celui de ses collaborateurs. Dans une société en mutation, UCM estime que l’entrepreneuriat doit rester un vecteur de création d’emplois ».
Analyse sectorielle : Des secteurs fragilisés ou renforcés
Les services aux entreprises et l’immobilier représentent la plus grande part des PME belges, et même plus particulièrement à Bruxelles.
Suivent la construction (1 PME sur 10) et l’industrie. Ce dernier secteur enregistre d’ailleurs la plus haute croissance depuis 2002 en termes absolus. Autrement dit, il n’y a jamais eu autant de PME industrielles. Malheureusement, la part industrielle dans le PIB n’a jamais été si faible, démontrant la difficulté actuelle du secteur.
Les professions libérales sont en croissance, surtout en Région wallonne qui enregistre la plus grande augmentation du pays.
A contrario, ce rapport PME 2024 laisse apparaitre une lente érosion du commerce de détail et de l’horeca en régions wallonne et de Bruxelles-Capitale. Historiquement, ces secteurs restent « à risques » dans toutes les régions et les récentes crises ont eu de lourdes conséquences.
Le commerce de gros, quant à lui, comptabilise une forte décroissance à Bruxelles. La région présente par ailleurs des indicateurs financiers plus inquiétants pour une multitude de secteurs : l’industrie, la logistique, le commerce de gros ou la construction sont autant de secteurs « primaires » de production plus en difficultés qu’ailleurs dans le royaume.
Si le nombre de PME bruxelloises continue d’augmenter, leur santé financière stagne ou se détériore.
En conclusion
Les PME, en Belgique, représentent plus de 98 % du tissu entrepreneurial. Le climat incertain dans lequel nous nous trouvons, depuis plus de 225 jours, est loin d’être un signal positif, notamment aux yeux des investisseurs étrangers.
Selon le « Rapport PME 2024 » UNIZO, Graydoncreditsafe et UCM, l’image de la Belgique en pâtit, alors que nos entreprises tentent, encore et toujours, de se maintenir et de se développer dans un climat incertain.
UCM insiste sur l’accompagnement « 360 degrés » de l’entreprise, dans toutes les étapes de sa vie et de sa croissance. Dans ce cas, il ne s’agit pas juste d’une question d’image mais bien de soutien et d’aides aux PME.
C’est la raison pour laquelle UCM plaide pour un cadre propice aux investissements, pour assurer et consolider la compétitivité de l’économie belge.
Caroline Cleppert, Secrétaire générale UCM : « L’évolution de la société et des modes de consommation, notamment le commerce en ligne, ont laissé apparaitre des fragilités dans des secteurs qui, jusqu’à aujourd’hui, étaient préservés. Cela ne fait que renforcer notre volonté d’être aux côtés de chefs d’entreprise. Non seulement être à leurs côtés pour les accompagner, les aider, les soutenir mais aussi les défendre au travers d’une approche 360 degrés spécifique et personnalisée ».
Les prochaines échéances du calendrier des PME, en matière d’obligations et de mises en conformité, sont parfois très courtes. Elles concernent – notamment - les transitions économie et écologique, mais aussi la facturation électronique, grand chantier dont l’atterrissage est prévu au 1er janvier 2026.
La grave pénurie de main d’œuvre, la pérennisation du « zéro coti » soutenant le premier engagement, l’indexation automatique des salaires ou encore la simplification administrative complètent le panel des préoccupations d’UCM.
Les PME ont besoin d’être soutenues et rassurées. Il est urgent de pouvoir compter sur des gouvernements de plein exercice pour créer un climat où il fait bon entreprendre en Belgique. Des réformes structurantes sont nécessaires, et vite !